L’ETAT ISLAMIQUE ET SON AUDIENCE : un ciblage sciemment déployé à la conquête des cœurs et des esprits

Il est évidemment essentiel de comprendre que le contenu du message diffusé par l’EI, notamment sa cyber-littérature djihadiste,  s’inscrit dans une stratégie de communication élaborée et sophistiquée jouant un rôle primordial dans ce qui pourrait être considéré comme une vraie « guerre des idées ». Lorsqu’il est question de sophistication, il doit être entendu comme utilisant les méthodes de communication modernes, ainsi que celles de relations publiques, tout en ajoutant une segmentation précise et efficace de l’audience. Cette segmentation présente l’intérêt d’une division des individus ciblés, permettant à l’EI de pouvoir adapter les outils en fonction des destinataires choisis. Par cette hiérarchisation des « Oumma » (communauté de fidèle), l’EI est capable de cibler parfaitement les audiences qu’il souhaite atteindre, augmentant ainsi ses chances de persuasion ou d’influence. En effet, il adapte les moyens déployés en fonction du public visé, pour parvenir à faire pénétrer efficacement son message dans les cœurs et les esprits de celui ci. Conscient du potentiel illimité des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC) et des réseaux sociaux, il manie avec agilité et sophistication les outils de diffusion de l’information du XXIe siècle, en totale contradiction avec sa vision califale moyenâgeuse. En effet, en perpétuelle recherche de symboles provenant de l’époque du Prophète, l’EI les incorpore dans ses productions macabres, où sa singularité s’illustre par une esthétique djihadiste de l’horreur. Ainsi, les leaders du groupe et ses membres développent une propagande redoutable, fondée sur un aspect tant rationnel, qu’irrationnel. Il manipule les « faits pour démontrer, de façon rationnelle, la supériorité de son système et la réalité prétendue de son utopie imaginée [1]». Toute la communication mise en œuvre répond à des buts politico-religieux et idéologiques définis, où l’homme est à la fois l’enjeu et le moteur de l’action. C’est ainsi que l’entité se fixe l’objectif de conquérir affectivement et intellectuellement ses cibles, par une diversité de moyens déployés. L’information apparaît au cœur des techniques utilisées, étant la communication de tous les faits, les nouvelles, les explications, destinée à donner aux individus ou aux groupes auxquelles elle s’adresse, les moyens de fonder leur opinion[2].

            D’autre part, il est intéressant de relever la marque de fabrique du groupe, illustrée par la binarité de son message, qui oscille entre action et guerre psychologique. En effet, l’action psychologique, vise ainsi à fortifier l’adhésion volontaire aux idéaux et objectifs généraux de la communauté, ainsi que de maintenir une compréhension et une collaboration avec les alliés, l’action psychologique revêt alors souvent les techniques de la propagande. Tout cet effort est mis en œuvre afin d’éclairer l’opinion, d’orienter les sentiments, l’attitude et les comportements des adhérents afin de réaliser les objectifs stratégiques ou tactiques attendus par l’EI. Le combat de l’EI s’illustre également par la notion de guerre psychologique, destinée à influencer l’opinion, les sentiments, l’attitude et les comportements des adversaires de manière à les modifier dans un sens favorable à la réalisation des objectifs de la guerre.

            Ainsi, la notion de djihad virtuel (djihad sur les réseaux, internet ou en ligne) prend alors tout son sens dans cette conquête des cœurs et des esprits et apparaît comme un formidable outil permettant de viser les populations les plus éloignées ou la diaspora musulmane. Les djihadistes permettant ces actions peuvent être considérés comme des « digital natives » [3] maîtrisant parfaitement les codes culturels des jeunes générations, où le numérique est un élément central de ce siècle. En effet, le numérique a offert à ce groupe une perspective nouvelle et des ressources inépuisables pour la prolifération de leur influence en ligne.

            Section 1: l’Oumma locale et l’Oumma proche.

 

  1. Entre valorisation d’une nouvelle « colonie de peuplement » et vision autoritaire du gouvernement.

            L’objectif ultime de ce proto-État étant de bénéficier de la légitimité de tout État, se doit d’obtenir le soutien de sa population, de confession musulmane sunnite, à cheval entre la Syrie et l’Irak. La volonté de crédibilité est recherchée par tous moyens afin d’ancrer dans les esprits que leur vision califale et le projet politico-religieux qui l’accompagne est le remède à tous les maux des populations locales. Cependant, comme tout État à tendance totalitaire, l’EI doit affirmer son autorité, ce qu’il réussi particulièrement bien en faisait régner l’ordre par la crainte, la peur et la terreur au regard du sort réservé aux transfuges, aux prisonniers, aux homosexuels, aux femmes ou aux minorités religieuses. Dès lors, l’EI vacille entre la valorisation de son image comme entité politique, sociale et religieuse capable de recevoir le soutien de sa population, tout en restant intransigeant voire extrémiste quand à la rétribution de la Justice en son sein.

            Le groupe a mis en place un véritable système de presse locale diffusant un flash info du jour des événements de l’État Islamique[4]. Il existe une importante stratégie d’endoctrinement des populations car s’inscrivant dans une stratégie durable et ayant des objectifs à long terme, il est primordial pour l’entité d’obtenir l’adhésion et le soutien des populations locales notamment par des allégeances souvent forcées. L’argumentaire déployé s’articule notamment autour des thèmes de la sécurité, de la pratique d’un islam pur et véridique du temps du Prophète, de la fin de la corruption des États arabes, du retour de la stabilité des prix. En d’autres termes, tout est mis en place pour accorder une vision positive de l’ « arrière front » de l’EI, de cette nouvelle colonie de peuplement. L’obsession de l’image et la volonté de rassurer les djihadistes désireux de rejoindre les rangs et de s’y installer durablement est flagrante. Pour se faire, furent crées par Al Hayat Media Center, une série de huit mujatweets[5] de mai 2014 à juin 2014. Ces mujatweets, terme provenant du néologisme mettant en corrélation les termes mujaheed et « tweet », sont des séquences vidéos très brèves de quelques minutes, vantant les vertus de la vie au sein de EI, diffusées sur Youtube notamment. Le premier épisode par exemple, met en scène une recrue européenne chantant une chanson en allemand louant l’EI. Le second clip vidéo met en scène des enfants partageant un bon moment avec les combattants et militants, quant au troisième, il met en évidence un chef syrien dans sa vie quotidienne et explique comment la vie se déroule depuis que l’Organisation contrôle la région. Le quatrième réalisé en juin 2014, est d’un modèle un peu différent. La vidéo accompagne un membre allemand de l’EI visitant un hôpital et qui s’adresse aux destinataires en ces mots « Come to the land of honor and search for shabada (martyrdom) », la vidéo est sous-titrée en Anglais pour permettre au plus grand nombre de comprendre le dialogue. De plus, l’esprit de nation combattante est amplement cultivé dans la communication du groupe pour ce type de population.

            Cependant, contraint d’imposer son autorité et son intransigeance salafiste, le groupe pratique l’exemplarité de la peine avec ardeur et le fait savoir au monde entier. Cette exemplarité de la peine est particulièrement visible lorsqu’il s’agit de punir les homosexuels. Par exemple, le 13 août 2015[6], la province de Homs de l’État Islamique a diffusé une vidéo sur Internet montrant l’exécution de deux hommes de Palmyre, en Syrie, reconnus coupables de s’être livrés à des actes homosexuels. Les hommes ont été projetés du haut d’un immeuble, puis lapidés. Au début de la vidéo, d’une durée d’un peu plus de six minutes, un homme masqué de l’EI lit à voix haute la sentence des homosexuels devant un rassemblement d’hommes et d’enfants. De plus, le magazine Dabiq est également un outil utilisé pour mettre en évidence la punition collective comme étant l’une des sentences les plus appropriées pour dissuader les opposants, les milices du réveil ou toutes personnes dissidentes. Toute une série de photographies des massacres et d’exécutions sont disponibles pour prévenir toute rébellion contre le groupe et persuader de sa suprématie finale sur toute forme de résistance. Ainsi, opérant une dichotomie et une segmentation de son message l’EI a su instaurer une politique de la terreur assurant son autorité, tout en valorisant son image d’État alternatif à un système antérieur corrompu. Il a obtenu une certaine légitimité au sein de sa population lui permettant par la suite d’étendre son califat au delà de ses frontières initiales.

  1. Le système d’allégeance à l’EI: une vision expansionniste du Califat.

            Ayant à l’esprit les débats existants au sein des penseurs djihadistes autour du concept de bay’a, il ne sera en aucun cas question de choisir l’une ou l’autre des thèses, mais de comprendre la notion générale[7]. En effet, certains penseurs considèrent que l’EI n’est pas un État sous la forme d’un califat mais plutôt un champ de bataille pour le djihad qui ne nécessite qu’une allégeance restreinte et non totale comme certains le revendique. Pour exemple, c’est une allégeance restreinte qui est faite au leader d’Al Qaïda Al- Zarwahiri, ne concernant que les questions du djihad. En revanche, pour l’EI c’est une l’allégeance non restreinte donnée au pouvoir politique du mouvement, où la communauté toute entière doit obéissance au calife et ce, pour toutes questions, et non celles seulement cantonnées au djihad.

            De ce fait, dans la doctrine salafiste, dès lors que le Califat fut proclamé, il enjoint une obligation religieuse pour tous les salafistes de prêter allégeance, de répondre à l’appel du calife comme il fut mentionné précédemment. Cette allégeance est le système de base de la gouvernance islamique. D’autre part, cette allégeance érige un triptyque et un lien entre le domaine politique, religieux et militaire qui est un trait de caractère du califat. L’EI s’est focalisé sur cette allégeance en présentant un véritable outil marketing autour de l’investiture de ces « Bay’a »[8] et de l’obéissance au calife Ibrahim. Ces allégeances, aussi bien énoncées en ligne que matériellement exprimées, ont pour objectif d’établir un leadership tant territorial, que politique, qu’idéologique et virtuel. Elles permettent également de reconstituer les structures traditionnelles d’autorité et le leadership dans les régions locales sous le contrôle de l’Organisation, explique Philipp Holtmann. L’auteur décrit les différentes allégeances et le but de chacune d’elles, ce qui explique le nombre si important et la prolifération du phénomène. Il nomme pour commencer ce qui pourrait être traduit comme la plus petite allégeance « smaller bay’at » qui sont des allégeances faites par la communauté entière qui reconnaît obéissance à son chef, elle a donc une portée générale. Ensuite il nomme la seconde sous la dénomination « greater bay’ah » pour considérer celle de l’élection du calife Al-Baghdadi. L’auteur laisse ressortir la pratique judicieuse de l’EI pour contourner les restrictions théologiques concernant une allégeance forcée. En effet, les juristes islamiques expliquent qu’une investiture forcée ou par l’utilisation de la force armée est illégale. Le calife ne doit en aucun cas forcer la communauté à se soumettre à son autorité, ce qui est pourtant le cas en Irak et en Syrie. C’est pourquoi l’Organisation insiste sur le côté marketing de la cérémonie prônant le caractère volontaire de ces décisions.

            Ensuite l’EI met également en place deux autres types d’allégeance l’une pour forger des alliances locales et l’autre pour établir des alliances d’envergure internationale. Dès lors, la première poursuit un objectif d’expansion territoriale et d’endoctrinement, tandis que la seconde consiste à adopter un terrorisme de dissuasion et de représailles stratégiques. Au niveau local, il s’agit de forger des alliances avec les tribus et les communautés sous le contrôle de l’EI. En revanche, la vision internationale de ces cérémonies lui permet, comme pour Al Qaïda, d’élaborer une hiérarchie, un commandement stratégique et de créer des obligations pour les groupes affiliés. Contrairement à la pratique de l’ancienne organisation confirmant par ses relais médiatiques les allégeances portées à son égard, l’EI n’opère pas de la même manière, considérant ce processus trop long et inefficace. En effet, toute la stratégie de l’EI étant fondée sur le dynamisme, la réactivité et la rapidité, il utilise les allégeances populaires afin de forger rapidement de nouvelles alliances internationales par la mise en place d’un leadership « longue portée » par le biais d’Internet. Ses destinataires ne sont pas seulement des groupes terroristes de grande envergure mais également des individus, des petites communautés ainsi que des réseaux dispersés. Là encore, on observe réellement le caractère universaliste et généraliste du mouvement. Le facteur primordial, selon l’EI, ne semble pas être forcement la reconnaissance officielle de l’affiliation mais plutôt les convictions idéologiques des groupes qui souhaitent rallier le mouvement en honorant leur allégeance comme un contrat transcendantal islamique, explique Philipp Holtmann. Ainsi la vision de l’EI peut se résumer par ces dires « if you cannot perform hijrah for whatever extraordinaire reason, then try in your location to organize baya’at to the Khalifah Ibrahim. Publicize them as much as possible. Gather people in the masajid, Islamic centers, and Islamic organizations, for exemple, and make public announcements of bay’ah. Try to record these bay’ah. Try to record these bay’at and then distribue them through all forms of media including Internet». Enfin, un autre type de serment est mis en évidence pour son attrait fonctionnel afin de motiver les combattants à remplir des buts tactiques spécifiques. Ceux ci sont intitulés « Fighting-pledges » (Bay’at qital) ou « death-pledges », provenant des combattants avant une bataille par exemple. Tout ce processus permet à l’EI de faire rentrer ses combattants dans une sorte de transe face au combat, de les radicaliser. Cette pratique se retrouve également chez les enfants pour les endoctriner.

            Enfin, le serment en ligne fait également partie de la structure de pouvoir de l’EI. En effet, il permet de solidifier et de connecter le monde réel au monde virtuel. Ainsi, de nombreux sympathisants ont pu par l’intermédiaire des médias sociaux prêter allégeance au Calife. Ce serment en ligne est supposé stimuler les adhésions en augmentant le sentiment de fraternité, de communauté, d’obéissance allant même jusqu’à faire émerger de futurs supporters actifs sur le net voire des acteurs à part entière du mouvement. D’autre part, l’auteur explique que l’EI espère que ce sentiment d’obligation va exercer une pression physiologique suffisante sur ces individus pour les pousser à agir seul. Tout ce « online Bay’at » fut expérimenté depuis 2006 par l’État Islamique en Irak, notamment en 2010 où une campagne fut menée sur les forums djihadistes qui appellent les membres à confirmer l’élection du leader du mouvement de l’époque à savoir Abou Omar Al-Bagdhadi. L’EI utilise ce système présent dans l’Islam afin de créer un lien virtuel de légitimité ainsi qu’un « leadership longue portée » autour de « sa marque », une sorte de concept marketing. Ainsi, entrelaçant des acteurs réels, des événements, des campagnes en ligne et des discussions sur les médias sociaux, le concept devient connecté à l’autorité idéologique de l’EI, allant jusqu’à considérer le jihad jusqu’à la mort. Dès lors, ce procédé s’inscrit dans le paradigme du leadership virtuel, qui n’est à proprement parlé pas un véritable leadership mais néanmoins psychologiquement très efficace.

            Certains exemples peuvent être soulignés matérialisant concrètement la portée de ces allégeances et la stratégie expansionniste du groupe. Il faut cependant garder à l’esprit la volatilité de certaines d’entre-elles, pouvant se modifier au cours du temps. Cependant, plusieurs wilayats furent durablement fondées notamment en Arabie Saoudite, au Yemen, en Egypte, en Libye ou encore en Algérie, Dabiq #5. En effet, l’EI avait déclaré sa volonté, très clairement reprise dans un article du New York Times, en ces termes « the group is expanding beyond its base in Syria and Iraq to establish militant affiliates in Afghanistan, Algeria, Egypt and Libya… raising the prospect of a new global war on terror » (New York Times 14 février 2015). D’autre part, dans un enregistrement audio, le calife Al-Baghdadi avait annoncé, en novembre 2014, avoir accepté plusieurs allégeances de groupes djihadistes, notamment en Algérie « Jund Al-Khilafah », en Libye « Majlis Shura Shabab Al-Islam » et dans le Sinaï, en Egypte « Ansar Beït Al-Maqdis », et quelques autres au Yémen et en Arabie Saoudite[9]. Le point commun de ces organisations s’illustre par le fait qu’elles opèrent dans des territoires qui échappent au contrôle de l’État, où dans des espaces où le pouvoir politique est inexistant tel qu’en Libye ou au Yémen (ISW Décembre 2014). Autre caractéristique commune pour l’essentiel d’entre-elles, le canal médiatique est largement utilisé pour les diffuser. Le direct et Internet permettent une accessibilité en temps réel et une diffusion massive de celles ci. Ces allégeances ont une sorte de « rythme », de rituel afin d’exprimer leur soumission au Calife et se présentent sous le même format, mais peuvent diverger quant à leur contenu ou leur portée[10]. Par exemple, l’allégeance faite au calife Ibrahim par le leader de Boko Haram, Abubakar Shekau, le 7 mars 2015, n’impliquait pas à son commencement une collaboration logistique ou opérationnelle. D’autre part, selon le reporter David Thomson[11], cette allégeance sert également les intérêts de Boko Haram qui ne se résigne plus qu’à une simple assise nigériane. Il est notable que le groupe sort de ses frontières pour drainer des combattants venus de l’extérieur, notamment dans les États frontaliers du Nigéria. Par une sophistication de ses vidéos et des supports utilisés, Boko Haram bénéficie désormais du coup de publicité et des compétences techniques nécessaires afin de séduire de nouvelles recrues. En revanche, elle peut être considérée comme une coopération idéologique qui renvoie, selon le journaliste d’RFI, à un message fort sur les intentions futures de ce groupe, pouvant par la suite se concrétiser par une collaboration plus étroite entre les deux groupes ce qui fut réalisé en avril 2015. En effet, à cette date Boko Haram devient l’EI en Afrique de l’Ouest sous l’anacronyme anglais ISWAP. Un autre exemple peut être cité, celui de la Libye. D. Thomson explique, que l’EI a envoyé des combattants notamment médiatiques provenant de Syrie, pour « prendre souche » dans le territoire, on assiste à une véritable externalisation de l’EI et de ses compétences. En date du 9 mai 2015, une nouvelle allégeance est portée à EI par la brigade algérienne Skikda par un message audio reprenant un discours du calife relayé par la radio Al-Bayan.

            Ensuite, Dabiq #5 informe les intéressées sur les conditions à remplir afin d’obtenir la validation de l’allégeance. Une fois l’allégeance acceptée, le groupe affilié doit désigner un wali ou un gouverneur, un conseil de la Shura, selon les explications là encore fournies par le magazine. Les leaders doivent ensuite prouver leur volonté d’appliquer la Charia selon la ligne directrice de l’EI dans chacune de leur région. Ce n’est qu’à partir de cet instant que l’aspect militaire et la stratégie qui en découle pourra être élaborée au sein de la nouvelle Wilayat. Le groupe ne se limite plus à la sphère régionale. Grâce à l’avènement et l’emploi des nouvelles technologies de communication et d’information (NTIC), des réseaux et d’Internet, l’EI dispose d’une portée internationale pour cibler ses nouvelles recrues.

Section 2: L’Oumma lointaine

 

            Ce type particulier de communauté, dénommée « l’Oumma lointaine » regroupe la diaspora musulmane ainsi que les potentielles recrues. C’est une cible essentiellement non arabophone, ce qui explique les sous titrages et l’adaptation culturelle afin de séduire et de persuader ce segment d’audience. De plus, les combattants étrangers sont particulièrement visés au sein de cette catégorie[12] auxquels un message stratégique leur est envoyé. En effet, dans un premier temps il leur est demandé de réaliser la Hijra (Dabiq, Messages et vidéos de martyrs, vidéos de combattants étrangers) en laissant sous entendre une obligation sous-jacente. Ensuite, ils sont appelés à déclarer Bay’a, et enfin, pour ceux dans l’impossibilité de se rendre sur place, de conduire des attaques de « loups solitaires », (Dabiq Issue 5, « Direct result of the Shaykh’s call to action » et le discours du porte parole Adnani du 21/09/2014). Enfin, il faut également noter l’existence de certaines cibles privilégiées retenant l’attention particulière du groupe telles que le Canada, la France, l’Allemagne, l’Indonésie, le Kazakhstan, la Moldavie, la Russie et la Grande Bretagne.

  1. De la Hijra au terrorisme individuel.

            Les caractéristiques principales de toute la cyber production djihadiste salafiste à destination des futures recrues d’Occident reposent sur les notions de quête de cause et du besoin d’appartenance. Ces deux thèmes sont constamment repris dans le contenu qui leur est destiné afin de répondre à leurs besoins, ce qui explique le succès de l’entité. Le salafisme y est présenté comme une solution et la religion, les croyances ainsi que la spiritualité sont mis en avant. De plus, le besoin d’autorité, de règles et l’abdication de la liberté sont également des thèmes attrayants pour influencer et convaincre les individus ciblés. Dans cette étape de la communication, nous sommes au cœur de l’endoctrinement, définit comme l’exploitation d’une radicalisation au profit du but recherché, faire la Hijra, combattre sous l’étendard noir ou passer à l’acte sous l’angle du terrorisme individuel. La méritocratie, doctrine suivie par le groupe, offre également à ces jeunes, l’espoir que tout est possible, ce qui n’était pas souvent le cas dans l’Organisation Al Qaïda. L’exemple le plus notable semble être celui du commandant en chef de l’État Islamique sur le théâtre syrien Omar al-Shishani, un géorgien d’origine tchétchène qui a servi dans l’armée géorgienne lors de l’affrontement avec la Russie en 2008 et s’est rendu en Syrie en 2011. Il fut observé antérieurement la mise en place d’une stratégie par les leaders du mouvement afin de séduire, convaincre et persuader les potentiels adhérents au mouvement, tout en utilisant des vecteurs adaptés à ces jeunes. En effet, l’EI est un prédateur redoutable pour ces jeunes candidats car ses membres manient avec prouesse les codes contemporains et occidentaux susceptibles de toucher ces jeunes individus (18- 30 ans). Les membres de la branche médiatique de l’Organisation mettent en œuvre des moyens considérables d’adaptation culturelle afin de toucher par le meilleur vecteur les ciblées choisies. Ils se sont institués comme des « gardiens et intermédiaires de l’information », intériorisant le rôle de disséminateurs[13] et de rabatteurs. Ils ont pour objectif précis d’instiller les messages et les contenus émanant de EI auprès des potentielles recrues (Shamis Witness, Ibrahim alias crush nos ennemis / Ichigo turn), ils ne proviennent pas forcement d’Irak ou de Syrie mais souvent originaires d’Europe où ils s’autoproclament porte parole de EI. Ils permettent d’accorder l’accès à une information inaccessible aux utilisateurs de base et agissent comme des intermédiaires. Ainsi, ils diffusent une propagande non-arabe et facilitent l’accès au contenu arabophone. Le but étant d’attirer leur attention, d’embellir l’image et la puissance du groupe afin d’encourager leur soutien à EI. La prise de conscience du public occidental, de ses codes et de ses faiblesses, permet aujourd’hui à l’EI d’atteindre un panel d’individus bien plus étendu et diversifié, que ce qu’avait pu réaliser AQ avant lui. De plus, grâce à l’essor des NTIC et des réseaux, l’EI dispose d’une portée planétaire dans la diffusion ciblée de son message et peut aisément ajuster celui ci en fonction des individus ciblés derrière leurs interfaces. Ainsi plusieurs combattants ont, depuis plus d’un an, documenté sur leurs réseaux leur djihad afin de le rendre accessible à tous, comme par exemple, le compte Twitter d’Abu Ayub maldifi qui avait posté « par la grâce d’Allah, nous profitons de sites et de paysages magnifiques et tout ceci est gratuit. Il vous suffit d’être moudjahidin ». En effet, le chercheur El Difraoui expliquait qu’il a « toujours un aspect très boy-scout dans la communication des islamistes. A ces jeunes qui se morfondent en banlieue, on montre des images de combattants en pleine nature. C’est une façon de présenter le djihad comme une aventure romantique »[14]. Une autre vidéo populaire et diffusée sur Twitter et Facebook, intitulée « Khairah Ummah », avait pour objectif de montrer aux potentielles recrues, la création de la meilleure Oumma produite par l’humanité. Elle est réalisée en plusieurs versions pour atteindre un public occidental avec des sous-titrages multilingues, anglais, français, russe et turque. Le but de la majeure partie des productions citées étant de construire une image d’un « djihad normal » en accentuant les actes de la vie quotidienne des combattants, s’efforçant de minimiser les contraintes du djihad en publiant des photos de leur petit déjeuner, des moments de camaraderie, des repas pris en commun, ou encore par l’intermédiaire de la vidéo qui prône les vertus d’une vie rythmée par le djihad« There is no life without jihad »[15]produite par Al Hayat Media Center le 19 juin 2014. Ainsi, plusieurs combattants interviennent toujours au cours de ce type de vidéos en témoignant de leur expérience sur place et en lançant un appel à les rejoindre afin de mener une vie digne. Ces « brothers », selon l’appellation du groupe, apparaissent comme des idoles et des exemples à suivre pour ces jeunes. Abu Yahyaash Shami ou Yilmaz, ancien soldat allemand, qui entraîne les combattants dans différentes factions en Syrie, a documenté son expérience syrienne en postant des photos sur Instragram sous le pseudo « Chechclear » en référence à une vidéo violente de l’insurrection tchétchène décapitant un soldat russe dans les années 1990. De plus, la revue Dar al-islam illustre véritablement cette volonté de pousser ces musulmans à rejoindre le califat. Elle fait état de « l’immense bienfait qu’est celui de vivre sous la foi d’Allah au milieu des croyants. Et pour rappeler à ceux qui n’ont pas accompli l’obligation d’émigrer de la terre de mécréance et de guerre vers celle de l’Islam qu’ils sont en immense danger dans ce monde et dans l’autre ». Cette vision utopiste de la vie sous le Califat offre une alternative plausible aux individus déçus par une laïcité et une démocratie ne prenant pas en compte leur religiosité. Ils réconfortent ceux qui ne se retrouvent pas dans les systèmes occidentaux leur ouvrant la porte vers un nouveau monde empreint de Foi et de « liberté ». Une autre vidéo en date du 7 juin 2015 d’une durée de 13 minutes, réalisée par la branche médiatique de la province de Raqqa, est une interview d’un combattant français connu sous le nom Abou Salman Al-Faransi. Il y explique sa conversion à l’Islam et comment il a rejoint EI en Syrie. Mais à travers cette vidéo il appelle les français musulmans à rejoindre l’EI pour y pratiquer le djihad. De plus, il menace également les pays de la coalition étrangère et précise que les combattants sont prêts à frapper n’importe où et n’importe quand. La vidéo est réalisée en français et sous titrée en arabe ce qui montre bien la portée et l’audience visée de ce type de vidéo. Elle est distribuée par les branches médiatiques de l’EI ainsi que par ses partisans sur Twitter et se trouve hébergée sur des sites de partages de vidéos tel que Youtube, archive.org ou encore senvid.com. Les réalisateurs filment le protagoniste dans plusieurs endroits de la ville et durant sa vie quotidienne montrant ses activités routinières. La vidéo est accompagnée par un nasheed français de recrutement intitulé « Extend your hand to pledge allegiance ». Une vidéo de juillet 2014 « the chosen few of different lands » produite par Al Hayat Media Center, met en scène à son tour un canadien nommé André Poulin, connu sous le nom d’Abu Muslim. Il était une pièce maîtresse de la propagande extrémiste. Il appelait dans sa vidéo de nouveaux djihadistes: docteurs, ingénieurs, professionnels, volontaires et bailleur de fonds, tout en donnant un compte rendu sur sa vie quotidienne. Au regard de ces techniques d’approche culturelle, le chercheur El Difraoui expliquait que « ce discours personnalisé donne un visage plus humain du djihad, une forme de normalité que l’on ne voyait pas dans les vidéos d’Al Qaïda ». Ces exemples motivent les jeunes recherchant un modèle à suivre, une inspiration les poussant à agir par la suite. La familiarité du message permet d’approcher au plus près ces jeunes sans les effrayer puisqu’ils sont persuadés de déjà connaître la vie qui les attend sur place. Par une communication prolixe autour de ce quotidien, les jeunes sont persuadés de laisser derrière eux une vie de mécréant au profit d’une vie simple et heureuse. Le groupe a fait preuve d’imagination allant jusqu’à publier un « guide touristique de l’État Islamique [16]» intitulé « Vacances au Sham, le guide touristique » ou encore « a brief guide to Islamic state » par le djihadiste britannique Abou Rumaysah. Cependant, même si la volonté première de l’EI était d’obtenir l’adhésion du plus grand nombre, ce n’est que pour parvenir par la suite au but ultime; la « guerre dans le sentier de Dieu » par le djihad.

            En conséquence, l’incitation à prendre les armes est sans cesse rappelée et martelée dans l’esprit de ces jeunes. Des faits « d’armes » ou « des actes terroristes » leur sont relatés afin qu’ils puissent s’en inspirer ou copier de tels agissements (copycat) à l’image des attentats commis par Medhi Nemmouche ou Mohammed Merah. D’autres occidentaux sont également pris pour modèles, mais cette fois pour la valorisation du statut des occidentaux au sein de l’entité, à savoir « Jihadi John » ou encore Maxime Hauchard. En revanche, l’EI inspiré par les écrits d’Al Suri influence et recommande à ses membres d’agir seul, selon leur propres moyens, s’ils sont dans l’impossibilité de rejoindre les terres d’Islam. C’est ainsi qu’apparaît la notion très médiatique et controversée de « loups solitaires ». Dans le présent développement, le terme de terrorisme individuel ou celui du djihad individuel seront préférés, en tant que nouveau processus poussant à une individualisation du terrorisme. Le terme « loup solitaire » des années quatre vingt dix de Tom Metzger et Alexis Curtis désignait le mouvement des « white supremacists » agissant par une violence politique. Il était précisé une différence entre une « cellule dormante » et les « loups solitaires ». Ces derniers sont des individus agissant de leur propre chef sans aucun ordre ou connexion avec une organisation ou groupe d’individus. Alain Rodier[17] explique que cette notion englobe plutôt quatre catégories d’individus qui peuvent répondre à ce concept assez fou. Cependant, afin de respecter au mieux les dires des membres de l’EI et leur vision il sera préférable d’éviter de garder à l’esprit cette notion trop médiatique de loup solitaire. En s’intéressant à la publication de la revue Dar al-islam #2, il est essentiel de relever que les auteurs dénigrent ces « loups solitaires », mais qui n’est autre qu’une critique déguisée à l’encontre de l’organisation rivale AQ[18] et de sa stratégie.  La revue exprime cette critique en énonçant que « son acte (référence au martyr Abou Basir Abdallah Al ifriqi) en totale conformité avec le Qour’ân et la Sounnah, met fin aux théories humaines innovées du loup solitaire promues par certains groupes égarés. La base du djihad est qu’il est mené en groupe sous les ordres du Calife comme il l’était  à l’époque du Prophète Allah ». Selon les salafistes djihadistes de l’EI aucune innovation n’est permise car elle sous entend qu’elle n’a pas été donnée par Allah. Cette affirmation permet de comprendre le mécanisme de l’EI dans sa vision du djihad global et sa volonté de relayer AQ au rang d’Organisation non-islamique. Ainsi, le concept de « résistance sans leader » (Louis Beam) reprise pour le terrorisme islamiste en un « jihad sans leader » (Sageman), permet de comprendre l’évolution actuelle du terrorisme passant du groupuscule au « terrorisme individuel ». Cette vision du terrorisme fut également prônée par Abou Moussab Al-Suri. Pour reprendre la typologie établie par Marc Sageman, Al Suri appartient à la première génération de djihadistes, il a enseigné l’art du djihad à la deuxième génération et a théorisé le processus de décentralisation ayant donné naissance à la troisième génération. Il considérait  les individus tels que des éléments privilégiés car ils sont imprévisibles et difficilement détectables, notamment lorsqu’ils agissent selon la Taqiyya ou l’art de la dissimulation.  Le chercheur Marc Hecker (IFRI) reprenait les idées principales de ce dernier, en expliquant qu’il était conscient que face à un adversaire matériellement supérieur, la concentration des moyens peut s’avérer fatale. Sa théorie sonne donc comme un appel à la dispersion, à la décentralisation maximale, processus largement utilisé dans tous les domaines par l’EI. Des « camps d’entraînement mobiles » doivent être créés et le djihad mondial, réunissant potentiellement toute l’oumma, doit s’organiser autour de petites cellules, limitées parfois à une seule personne, indépendantes les unes des autres et susceptibles de s’auto-générer. Al- Suri résume sa théorie en un slogan: « nizam la tanzim », c’est à-dire « un système, pas une organisation». Il précisait également qu’« il n’y a pas de liens organisationnels entre les membres des unités de la résistance islamique globale.  Les seuls liens sont  [… ] un système d’ action , un nom et un  but communs ». En effet, Gilles Kepel[19] explique que selon lui« cette résistance ne saurait être menée par des groupes structurés, pyramidaux, trop facile à démanteler par la répression, mais par des réseaux souples de djihadistes bien formés, voire des individus isolés endoctrinés par le biais de sites spécialisés d’Internet ». Il s’avère que cette tendance semble se généraliser changeant le visage du djihadisme et du terrorisme avec de tristes illustrations telles que celles de Mohammed Merah, Medhi Nemmouche, ou dernièrement Amedy Coulibaly, où la pathologie de la violence fut sans nul doute dissimulée sous une cause plus noble, la défense d’un Islam humilié. Le changement de profil des candidats au djihad marque aussi la dimension inédite du groupe qui réussi à cibler tous types d’individus.

  1. Diversité des profils visés.

            La particularité du phénomène actuel s’illustre par la diversité des profils des candidats au djihad ne permettant pas d’établir de profil type. En effet, John Horgan, directeur du Center for Terrorism and Security Studies affirme également que depuis quatre décennies de recherches psychologiques aucun profil terroriste n’a encore pu être établi. L’anthropologue Dounia Bouzar[20] a pu observer un changement notoire dans les candidats au djihad, car il ne s’agit plus aujourd’hui, comme ce fut le cas durant les années précédentes, de jeunes de banlieues ou issus de l’immigration. Aujourd’hui, la radicalité salafiste djihadiste touche n’importe quel jeune, sans rapport direct avec son milieu social. Selon les études et les enquêtes réalisées, plusieurs traits communs sont tout de même décelés. Selon Yannick Bressan, la fragilité psychique des candidats, un profond détachement envers leur pays, leur communauté ou de leur famille et un désir de récits d’aventures sont autant de facteurs, qui tous s’inscrivent dans le cadre d’une problématique identitaire. A titre d’exemple, Samuel Laurent avait recueilli les propos du Cheik Omar Al-Bacri (libanais proche de l’EI), qui expliquait tout l’attrait de ce nouveau concept radicalisée de l’Islam, à savoir le salafisme djihadiste. Selon ses propres dires « Quand vous devenez salafiste, tout devient rassurant, le Coran vous guide en toutes circonstances. Il vous explique quand et comment agir: couper la main au voleur, donner cent coups de fouet aux fornicateurs, quatre-vingt aux buveurs d’alcool.. tout est clair! ». Ainsi, cette déclaration met en évidence la volonté d’une soumission totale à la religion, et par conséquent à son chef. Toute leur vie s’achemine au service de Dieu, l’Islam n’est alors que la seule réponse aux questions que ces individus peuvent se poser. D’autre part, le salafisme repose sur la communauté de croyants, l’Oumma, une masse indivisible laissant peu de place à l’individualisme et impossible d’en contester les ordres. C’est ce schéma qui est la plus part du temps recherché par ces jeunes en quête d’une cause, d’une identité, d’autorité, d’une famille ou d’un nouveau départ. D’autre part, deux argumentaires ont été répertoriés afin d’identifier les motivations de ces jeunes : l’un est fondé sur des motivations internes, l’autre sur des motivations externes. Ces derrières sont représentés comme les événements qui se produisent dans l’environnement de ces jeunes tel que la faiblesse étatique, l’éducation, des inégalités sociales et économiques, les conflits dans le monde. Les djihadistes par le biais de leur propagande se nourrissent de ce type d’informations, notamment en usant de la désinformation en remployant et en détournant des images ou des récits diffusés dans les médias occidentaux. Cependant, des motivations dites internes peuvent être citées, correspondant souvent à des motivations religieuses, qui souvent ne sont pas le seul facteur déterminant pour le passage à l’acte. S’ajoute également à cette motivation, un sentiment politique ainsi que certaines circonstances personnelles. Donner un sens à leur vie ou pour certains la recherche de rédemption sont également des facteurs répertoriés comme des sources d’incitation. Le criminologue Alain Bauer, a baptisé ce type de profil sous le vocable « gangsterroristes » ou jihadistes « hybrides » : « Ces délinquants qui pratiquent le vol à main armée, le trafic de voitures, continuent sous couvert d’Al-Qaeda. A un moment, dans leur esprit confus, au lieu de se renier, ces êtres trouvent une cause qui leur permet de poursuivre leur activité criminelle, façon d’atteindre croient-ils la rédemption.[21]». Ces individus sont le plus souvent la recherche de pénitence par le djihadisme qui séduit de nombreux musulmans européens et convertis, victimes d’une culture qui les incite selon eux à de tels actes. D’autres, selon l’otage français libéré Nicolas Hénin (Novembre 2014), « sont le produit de nos sociétés occidentales et ils avaient déjà une inclinaison à la violence pendant leur recherche d’identité. Maintenant, enfin, ils ont trouvé un prétexte pour laisser libre cours à ces tendances », décrivant ses tortionnaires, dont l’un était Medhi Nemmouche. Cependant, selon Scott Atran, les profils identifiés sont souvent des jeunes bloqués dans des étapes de transition de leurs vies, soit parce qu’ils sont devenus récemment français après une immigration, soit encore étudiant, soit entre deux emplois à la recherche d’une famille à construire, d’amis ou entretiennent un désir de voyager. Ce type de profil s’inscrit dans une volonté de changement et de prendre son destin en main. D’autre part, il faut également souligner que la majeure partie d’entre eux n’ont pas reçu une éducation religieuse mais se sont radicalisés par la suite à l’issue de l’appel militant du djihad diffusé par les groupes djihadistes. Vincent Geisser explique[22] qu’il s’agit soit d’individus de culture musulmane ayant découvert une idéologie radicale et attrayante, soit de convertis, convaincus par le binarisme réducteur de l’Organisation, comme une solution simple à leurs problème d’identité et de sens. Selon les études menées, la majeure partie de ces individus n’ont pas côtoyé ni des mosquées, ni même un gourou, mais se sont documentés et laissés séduire par un contenu téléchargeable et accessible sur internet ou par l’intermédiaire de « prédicateurs numériques » aux connaissances et compétences religieuses non-avérées. Les messages diffusés par le groupe trouvent un écho favorable chez les personnes qui le rejoignent, il leur offre clés en main  une chance d’exister, une cause à défendre, une rédemption, une terre d’accueil, une famille et parfois même la voie « royale pour atteindre le Paradis ». Plusieurs partisans s’expriment sur les réseaux témoignant de leur engagement et du bienfait de leur changement. Là encore, le rôle des prosélytes en ligne et le ciblage qu’ils accomplissent sont des outils essentiels pour le rabattre de tels individus. Ils identifient particulièrement les personnes vulnérables et cherchent activement à les « absorber » en renforçant leurs doutes sur leur situation actuelle tout en les convaincant de les rejoindre pour une vie meilleure. Des personnes marginalisées, ou en quête de visibilité parce qu’elles ne sont pas reconnues, deviennent alors des « proies » facilement atteignables. Certains récits provenant des « frères » ou des « sœurs » du djihad leur sont rapportés afin de les pousser à rejoindre les terres d’Islam, comme par exemple cet extrait; « That’s why I pledged alliance, in order to help the brothers and sisters of ISIS and teach them how to make da’wa to people who have long lived in humiliation and do not know the laws of Allah. We are, and we make da’wa to the children, to the elderly, to all people ».

 

            Cependant, l’afflux important de combattants étrangers et de leurs familles vers le califat est une réalité, mais cette communauté ne se cantonne pas aux frontières terrestres du Moyen Orient. La volonté universaliste et cosmopolite du groupe transparaît dans ses intentions, notamment par sa volonté de créer un lien direct entre sa communauté réelle et sa communauté virtuelle. En effet, le paradigme numérique lui offre la possibilité de créer une Oumma virtuelle, regroupant l’ensemble la diaspora musulmane sunnite inter-connectée aux quatre coins du monde. Un nouveau type de djihadiste voit ainsi le jour, tout comme un nouveau rôle attribué aux femmes dans ce djihad en ligne.

Section 3: L’Oumma virtuelle : les e-djihadistes et le djihad au féminin.

 

  1. La dé-territorialisation de la communauté des fidèles: l’Oumma

            Pourquoi une telle présence en ligne? Pourquoi cette volonté de créer une communauté virtuelle de fidèles soutenant l’EI et ses idées? Serait ce parce qu’elle permet de concrétiser de leur vision globale, cosmopolite et universaliste?

            L’évidence des faits suggère une réelle prise de conscience de l’opportunité de la e-sphère par les membres de l’EI, permettant de passer outre les frontières physiques et étatiques afin d’établir une sorte de « sanctuaire djihadiste numérique ». En effet, face à une société de plus en plus individualiste, certains individus développent un besoin vital de trouver refuge au sein d’une communauté. Cette communauté virtuelle devient alors une sorte de communauté de substitution dans une société en perte de repères identitaires. Celle ci n’est autre que le pendant d’une réalité sociale, clanique et communautaire. Il s’agit de reconstituer, dans le monde virtuel, sa communauté réelle, menant à une sorte de « tribalisme virtuel » pour reprendre les termes de Mathieu Guidère. Dounia Bouzar ajoute, qu’il est question pour ces individus de retrouver leurs « pairs virtuels », de reconstituer un espace sacré, qui renforce cependant l’isolement du groupe « purifié ». La virtualité offerte par les réseaux et les NTIC permet de constituer un tel sanctuaire. L’EI, conscient de cet enjeu, mise cette carte en recréant des liens communautaires dans cet espace virtuel religieux, où chaque internaute peut bénéficier d’une oreille attentive. En effet, ils établissent un échappatoire et une cause à soutenir, offert par la religion musulmane, à des laissés pour compte, en marge d’une société trop individualiste et inégalitaire à leurs yeux. La e-sphère leur offre également la possibilité de se construire une identité virtuelle propre, la construction et la définition de soi virtuellement. L’oumma virtuelle donne une seconde chance à ses adhérents, d’être celui que l’on ne peut être dans le monde réel et octroie une tribune pour s’exprimer, militer et échanger. L’EI exacerbe et instrumentalisme ces ressentis et se joue des émotions et des sentiments des e-djihadistes, afin de créer une cohésion virtuelle autour d’un but commun. Gilles Kepel parle même de « cluster », de tribu virtuelle, construite selon une vision horizontale. D’autre part, selon lui, ce monde numérique est une « bombe diasporique » qui occasionne un repli sur son groupe à une dimension inédite. En effet, cet enfermement communautaire peut s’effectuer à distance, nul besoin d’être proche, il suffit d’utiliser un réseau, créant une cette nouvelle forme tribale : la « tribu numérique ». En effet, les groupes Pro-EI jouent un rôle primordial dans la diffusion du message et dans l’expansion de la sphère d’influence du groupe.

            En revanche, par cette activité immatérielle proliférante, le groupe aurait-il la prétention de dresser une « armée numérique » au service du califat, notamment sous une dénomination aujourd’hui bien connue du « Cyber-califat »? Le menace d’un cyber-terrorisme pourrait-elle se concrétiser avec l’ascension du groupe sur les réseaux?

            Avant de s’intéresser à une quelconque cyber-conflictualité, il est nécessaire de noter l’avènement d’un nouvel acteur dans la e-sphère. En effet, les femmes jusqu’alors marginalisées du combat physique et militaire, trouvent une place dans le djihad médiatique et numérique. Elles y jouent un rôle important et actif, mobilisant les foules, séduisant les futures femmes de djihadistes, tout en répondant aux questions des plus hésitantes. Elles servent la cause salafiste djihadiste par un militantisme numérique et attirent de nouvelles recrues féminines dans les rangs de l’Organisation.

  1. e-djihad: une partition aussi féminine.

            L’anthropologue Dounia Bouzar explique la place des femmes au sein de la communauté musulmane précisant qu’il existe une séparation traditionnelle des sexes. Les hommes et les femmes évoluent dans deux univers distincts, l’un tourné vers le monde extérieur, la sphère publique, et l’autre, vers un monde intérieur celui de la sphère privée réservé aux femmes. Cette dichotomie allait de paire avec les tâches et les fonctions dévolues à chacun. Sans entrer avec plus de précisions sur le statut actuel de la femme dans la religion musulmane, il est seulement question ici, d’observer l’opportunité de ce monde virtuel pour ces jeunes femmes et filles qui peuvent exprimer leurs idées et militer, tout en restant dans la sphère qui leur est le plus souvent dédiée. Là encore, il n’est pas question de généraliser la situation féminine dans l’Islam, seulement d’apporter des éléments de réflexion sur la constitution d’une Oumma virtuelle et la place de celles ci en son sein. En revanche, une tendance actuelle doit être soulignée afin de comprendre le paradoxe que représente leur implication dans le djihad médiatique. En effet, les salafistes djihadistes, ont crée une sorte « apartheid racial pour se protéger des femmes et les neutraliser », explique D. Bouzar[23]. Ils créent une sorte de réduction de l’être humain à cette seule caractéristique identitaire, celui d’être une femme. En effet, cette anthropologue explique une tendance remarquée chez les radicaux qui vont en quelque sorte « effacer » celle-ci. «  le fait de refuser d’échanger avec elle la nie en la réduisant à un sexe. Assigné à une dimension sexuelle dans laquelle est n’est pas actrice, elle devient objet ». Mais pire encore, elle devient « l’objet diabolique ». Ainsi, Asma Guenifi[24] expliquait même qu’il existe une réelle frustration sexuelle exprimée envers les femmes, un objet qui se doit d’être caché des yeux de tous. Enfin, Dounia Bouzar ajoutait que le fait pour ces nouveaux radicaux de distinguer de manière si extrême une femme permettait de l’extraire de la communauté des humains. De plus, l’EI raffolant d’une lecture non conceptualisée des textes coraniques accentue cette déshumanisation de la femme légitimant son exclusion et les exactions subies par ces dernières.

            Mais alors comment expliquer leur implication au sein du djihad médiatique? Comment deviennent elles des actrices à part entière? Afin de cerner l’esprit dans lequel évolue ce paradoxe, il s’avère nécessaire de revenir à la vision « jusqu’au-boutiste » du mouvement de l’EI. En effet, selon l’expression empruntée à M. de Saint-Victor, l’EI utilise tous les moyens et les outils à sa disposition pour servir sa cause et ses intérêts, même s’il faut pour se faire il faut contredire quelques idéaux. D’autres exemples reprendront cette stratégie de maximisation, légitimant n’importe quelle pratique pourvu qu’elle soit bénéfique aux actions menées par l’Organisation. Après s’être arrangé pour détourner l’iconoclasme musulman, les membres de l’EI font de même avec le statut de la femme et son implication dans le djihad, leur offrant une « partition à jouer » Ainsi, la femme apparaît sur la scène du djihad global dans une lutte médiatique où la sphère privée chevauche la sphère publique, ouvrant une fenêtre sur le monde à ces jeunes femmes en quête d’un monde meilleur. Là encore, la supercherie d’égalité homme femme est instrumentalisée afin de créer une cause commune et faire émerger l’adhésion de ces jeunes femmes à leur vision du Califat. Deux figures légendaires et charismatiques du Coran sont également utilisées afin de légitimer et d’encourager les jeunes femmes; Fatima la fille du Prophète et Aïcha sa plus jeune femme. De plus, pendant les révolutions arabes, les femmes égyptiennes sympathisantes des Frères Musulmans ont joué un rôle considérable dans le soulèvement contre le régime égyptien. Mais les femmes étaient déjà revenues en force dans le terrorisme à partir de 2003 sur les sites islamistes, notamment au cours de la guerre d’Irak puis de Tchétchénie en 2008, commente le juge Marc Trévedic[25]. Le web a permis la libéralisation et l’émancipation de la femme salafiste, car nul besoin de porter la Burqa sur Internet. A l’époque d’Al Qaïda, on parlait de « veuves noires » pour les désigner. Une figure emblématique de ce type djihad était Malika El Aroud[26], qui énonça une phrase très parlante quant au rôle que ces jeunes sont amenées à jouer; « Mon arme, c’est l’écriture. C’est mon djihad, vous pouvez faire beaucoup avec les mots. Écrire est aussi une bombe »[27]. Poster un texte de propagande revient à poser une bombe dans l’esprit et le psychique des internautes, ce que l’EI a parfaitement cerné et utilisé. Ainsi, les femmes djihadistes du mouvement « pro-Islamic State » du groupe médiatique al-Battra Media Foundation a réactivé sa division « al-Khansa’Media Battalion[28] ». La leader de ce recrutement en ligne est une vétérance du djihad en ligne déjà active durant l’époque d’Al Qaïda où elle utilisait le pseudo « Al-khansa » pour couvrir ses opérations. Ce nom signifiant la « mère des martyrs » était celui d’une poétesse avant le début de la Révélation qui se converti à l’Islam. Après la disparition du Prophète elle stimulera ses fils pour qu’ils embrasent l’Islam et affrontent l’ennemi en leur tenant ces propos « Ô mes fils ! Vous avez embrassé l’Islam et émigré de plein gré. Par Dieu, en dehors Duquel il n’y a pas d’autre dieu, vous êtes les fils d’une femme qui n’a jamais trahi votre père, ni déshonoré votre oncle, ni mélangé votre lignée, ni changé votre famille. Vous savez ce que Dieu a réservé aux musulmans comme récompenses dans la lutte contre les infidèles ; sachez que la vraie vie commence après la mort. Dieu dit : « O vous qui croyez ! Armez-vous de patience ! Rivalisez de constance ! Soyez vigilants et craignez Dieu, si vous désirez atteindre le bonheur ! »[29]. Tout ceci explique la ligne de conduite recherchée par les membres de l’EI envers ces femmes recrutées à l’échelle planétaire. Ce recrutement mondial ouvre une possibilité incroyable pour la construction de la future génération de djihadiste mise en place par l’EI, qui pourrait s’apparenter au processus observé à l’époque nazie du Lebensborn expliqué précédemment.

            Le groupe avait initialement annoncé sa création en décembre 2013 et notifié la réactivation d’un compte Twitter le 4 septembre 2014 (@al_khansaa2). S’ajoutant au rôle de militante aguerrie voire de propagandistes djihadistes, ces dernières construisent également des « e-agences matrimoniales pour jeunes salafistes djihadistes ». Elles agissent telles que le font les « mentors » et tentent de trouver des femmes susceptibles d’ immigrer vers les terres du Califat, pour produire la future génération de djihadistes. Dès lors, elles servent d’intermédiaires et de « rabatteurs » virtuels auprès de ces jeunes recrues et prodigue une écoute attentive face aux questionnements de certaines. Le procédé le plus simple et le plus efficace selon l’EI était d’employer des jeunes femmes qui elles aussi avaient rejoint le Califat et témoignaient de leur expérience[30].  La huitième édition de Dabiq, contient un article écrit par une femme arabe ayant réalisé la Hijra et exhorte les autres musulmanes du monde à venir la rejoindre. Là encore, la manipulation coranique bat son plein. Elle persuade les jeunes candidates de l’obligation qui pèse sur elles et cite le Prophète en ces termes « les femmes sont les moitiés jumelles des hommes » ce qui revient à dire qu’elles aussi doivent faire la Hijra.  Une autre figure dénommée Aqsa Mahmood[31] détaille à son tour sous le pseudo Umm Layth, sur son compte Twitter ainsi que sur son blog, sa transformation. Elle y explique comment une jeune adolescente provenant d’un pays laïc et vivant selon un mode de vie séculaire s’est radicalisée. Depuis, elle séjourne en Syrie où elle continue ses activités en ligne et tente de montrer l’exemple aux autres jeunes filles. Le 28 juin 2015, elle publie un poème d’éloge aux attaques de l’EI du 26 juin en Tunisie, au Koweït et en France, intitulé « «Vendredi noir » sur son blog Tumblr. On peut y lire certaines lignes consacrées à la vengeance : « vengeance. C’est une réponse à notre emprisonnement. Ils essaient de nous rendre sourds, muets, aveugles face à la lumière d’Allah, mais elle brillera toujours » ; ou encore à des menaces voilées : « Peut-être comprenez-vous, peut-être pas, sachez seulement cela ; si vous n’avez aucune pitié pour nous, alors pourquoi devrions-nous en avoir pour vous », laissant transparaître l’implication de cette djihadiste dans le rôle qui lui est dévolu au sein de l’Organisation. Umm Abdullatif, étant connu comme Zehra Dumann, originaire de Melbourne, communique avec de potentielles recrues féminines via sa page sur Ask.fm et y décrit son « lifestyle » en louant les joies d’une telle vie. Elle y cite notamment certaines phrases telles que « c’est quelque chose que tu as besoin pour te connaître toi même »[32] et répond aux questions des jeunes femmes intéressées. De plus, un autre exemple peut être cité pour appâter les futures épouses. Un document mis en ligne, intitulé les « Femmes de l’État islamique : manifeste et étude de cas »[33], publié par la brigade Al-Khansaa[34] offre une vision de leur nouvelle vie afin qu’elle en connaisse les détails avent de s’engager.

            Le ciblage mis en place par l’EI lui permet d’ajuster le message transmis en fonction du destinataire visé. Les outils et les méthodes sont également adaptés afin d’atteindre efficacement les esprits. Il en va de même lorsqu’il est question de construire l’identité de son ennemi. La construction médiatique de l’ennemi est une donnée primordiale afin d’identifier clairement les adversaires à atteindre pour les combattants de l’EI. Les leaders mettent tout en œuvre afin de les discréditer, de les stigmatiser et de les déshumaniser, rendant le recours à la force nécessaire et outrageusement violent voire barbare. L’ambiance des supports constitués à cet effet, gravite autour du retour de la notion Guerre Sainte, justifiant la guerre et ses atrocités au nom d’une cause estimée juste : la défense de l’Islam contre les oppresseurs, les mécréants et les hérétiques. L’EI replace au cœur des débats l’ancienne guerre de religion, où les ennemis sont nommés « croisés » et où le but de la guerre est avant tout masqué par une revendication religieuse. Le groupe souhaite à terme voir l’étendard noir se profiler à l’horizon, convertir le plus grand nombre à l’Islam et soumettre l’ensemble de monde à ses prétentions. S’agirait-il d’un retour de la Guerre Sainte modernisée à l’aune du XXIe siècle?

Julie LINARES, diplômée Master II en 2015.

[1] Charlie WINTER « The virtual caliphate; Understanding Islamic States Propaganda strategy », juillet 2015, Quilliam Foundation.

[2]  TTA 117, p9.

[3] Marc Prensky « Digital Natives, Digital Immigrants » publié en 2001.  Selon lui, l’an 2000 n’a pas seulement marqué le passage d’un siècle à l’autre. Cette date constitue une rupture fondamentale dans la façon dont les nouvelles générations, nées à partir des années 80, apprennent. « l’hypertexte, la musique téléchargée, le téléphone dans la poche, les bibliothèques sur leurs ordis » ont vu leurs cerveaux se structurer différemment par rapport à celui de leurs aînés. Du moins, que leur « schéma de pensée » serait différent.

[4] https://ia601502.us.archive.org/0/items/AlbaYan_109/Mercredi%2017%20Rajab%20de%20l’année%201436.pdf

[5] http://jihadology.net/?s=mujatweets

[6] http://www.memri.fr/2015/08/18/avertissement-photos-graphiques-une-video-de-lei-montre-lexecution-de-deux-homosexuels-a-homs/

[7] Aller plus loin: Cole Bunzel « Paper state to caliphate: the ideology of Islamic State », p 26,19 mars 2015, Center for Middle East Policy at Brookings.

[8] « The different functions of IS online and offline Pledges (Bayat): creating a multifaceted nexus of authority », by Philipp Holtmann, Novembre 1(, 2014, on Jihadology.

[9] Aaron Y.ZELIN « The Islamic States archipelago of Provinces », in the Washington Institute, 14 novembre 2014. http://www.washingtoninstitute.org/policy-analysis/view/the-islamic-states-archipelago-of-provinces.

[10] Exemples sur archives.org https://ia600307.us.archive.org/14/items/bay3aa_201505/bay3aa.mp3

[11] Entretien téléphonique du 8 mai 2015.

[12] ISW global messaging strategy, december 2014.

[13] Terme employé par ICSR de Londres.

[14] France TV info du 1 octobre 2014.

[15]  https://news.vice.com/article/pro-isis-recruitment-video-encourages-foreign-fighters-to-join-jihad

[16] 12 mai 2015, https://Twitter.com/AbouZilleur_/status/598082514733797376/photo/1

[17] Alain Rodier « Quest ce quun loup solitaire ? », janvier 2015, note d’actualité N°378, Cf2R.

[18] Nouvelle brochure de l’État Islamique  en français intitulée « quAllah maudisse la France », 12 février 2015, MEMRI FR.

[19] Gilles Kepel, Terreur et martyre, Relever le défi de civilisation, Flammarion, Paris, 2008, p189.

[20] http://www.bouzar-expertises.fr/images/docs/METAMORPHOSE.pdf

[21] http://www.liberation.fr/societe/2013/05/20/le-jihad-nouvelle-generation_904308

[22] Vincent Geisser « Eduquer à la laïcité, rééduquer au « bon islam »?, migrations société 27 (157), janvier-février 2015.

[23] Dounia BOUZAR, Désamorcer lIslam radical, Paris, 2014, Editions de l’Atelier/Editions Ouvrières.

[24] « Dans la tête des terroristes. Profils psychologiques et ingrédients de la terreur ». Asma GUENIFI, le 2 avril 2015, Conférence IHEDN.

[25] Marc TREVIDIC, Terroristes: les 7 piliers de la déraison, 2013, Editions Jean-Claude Lattès.

[26] Activiste radicale belge d’origine marocaine née en 1959/1960, qui avait pour premier mari Abdessatar Dahmane qui a trouvé la mort en assassinant le commandant Massoud. Elle fut ensuite mariée à un second mari parti faire le djihad au Wazaristan. Elle est l’auteur du livre « Soldats de lumières » qui glorifiait les moudjahidines afghans. C’est avec son deuxième mari qu’elle devient très active sur internet, animant tous deux le site MINBAR SOS.

[27] Expression déclarée en mai 2008 dans le journal Herald Tribune.

[28] https://azelin.files.wordpress.com/2015/01/al-khansc481-media-battalion-22women-in-the-islamic-state22.pdf

[29] Coran Sourate III verset 200.

[30]  MEMRI FR, 3 avril 2015.

[31] Jeune fille provenant de Glasgow en Ecosse. https://Twitter.com/hashtag/aqsamahmood partie en Syrie pour épouser un combattant tunisien.

[32] http://www.rferl.org/content/islamic-state-jihadi-brides/26932055.html

[33] Document traduit en anglais par le chercheur Charlie WInter du Think Tank Quilliam foundation. http://www.quilliamfoundation.org/wp/wp-content/uploads/publications/free/women-of-the-islamic-state3.pdf.

[34] Egalement le nom de la brigade composée d’une cinquantaine de femmes chargées de patrouiller dans les rues de Raqqa, en Syrie, pour faire respecter l’idéologie de l’État islamique (EI), et parfois punir les récalcitrantes aux diktats de l’organisation djihadiste.

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